LE JARDIN DU CASINO
Dans cette ville de province,
Où l'on venait prendre les eaux,
Il est un arbre, c'est comme un prince
Dans le jardin du casino.
C'était un temps d'avant la guerre.
On disait : c’est une étrangère ;
Elle demeurait tous les étés
A la pension La Trinité.
Tous les mois d'août, cette personne
Chaque matin allait en cure,
L'après-midi dans la nature,
Et la soirée au backgammon.
A l’heure du thé, elle s’installait
Près de l’étang des floralies
Avec sa dame de compagnie.
Elle méditait ou bien lisait.
Chaque soir, dans la soirée,
Un ouvrier nommé René
Venait tailler les fleurs fanées
Sans cesser de la regarder.
Il faut vous dire, c’est un secret,
La contempler lui suffisait !
Le jardinier est amoureux
De son visage de porcelaine.
On raconte, à ce qu'il paraît,
Qu'elle est actrice américaine,
Que son prénom serait Vera,
Qu’elle aurait joué avec Capra.
L'hiver d'après, l'amour en panne,
Pour souvenance, il a planté
Tout près du banc de sa Roxane
Un plant de saule bouturé.
Il en a fallu, des années
Pour que les branches fassent ombrelle
Au visage de sa dulcinée
Elle qui craignait tant le soleil !
Et puis la guerre a éclaté,
L’établissement a fermé,
Véra n’est pas revenue,
Le jardinier a disparu.
Quand je vais me promener,
Dans le jardin du Casino,
Je marche tout seul au bord de l’eau.
Près du saule de Monsieur René,
Même quand les traces disparaissent
Il y a toujours des amoureux,
Qui se regardent tous les deux,
Et se bécotent des promesses.
Le Saule Salix Sp.
Au Parc de Triviers, CHALLES LES EAUX, le 21 février 2021
© Texte et photo Yves YGER
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